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AVERTISSEMENT

Amis lecteurs
Je ne fais ce Blog que pour vous faire decouvrir les tresors du Judaisme
Aussi malgre le soin que j'apporte pour mettre le nom de l'auteur et la reference des illustrations sur tous ces textes , il se pourrait que ce soit insuffisant
Je prie donc les auteurs de me le faire savoir et le cas echeant j'enleverais immediatement tous leurs textes
Mon but etant de les faire connaitre uniquement pour la gloire de leurs Auteurs

EROUV














Selon la Loi juive, pendant le Shabbat, journée qui dure du vendredi au coucher du soleil au samedi après l'apparition des deux premières étoiles (...), le repos absolu est obligatoire pour les croyants (...). L'interdiction de travailler inclut celle de porter un quelconque objet (...) hors de chez soi. Toutefois, si l'on se réfère à la Torah, un village, une ville, entourés d'un mur d'enceinte avec des portes, sont considérés comme des domaines privés, et dans ces villages, ces villes, chacun peut transporter des objets de chez soi à la rue, de la rue à chez soi... Somme toute, la ville devient le domicile. Mais à notre époque, peu de cités modernes sont entourées de remparts et par conséquent chacun devrait contenir ses activités dans sa maison s'il n'était aujourd'hui accepté que, telles des dérogations à la Loi, des erouvim soient construits. Ils consistent en fils (ou cordes) formant un mur imaginaire. Dans la plupart des cas, ces "frontières" sont créées en érigeant des poteaux et en les connectant ensemble par l'intermédiaire de filins en acier galvanisé (...).

Selon la Torah, dans toute ville entourée d'un erouv, le domaine public peut être considéré comme un territoire privé." Sophie Calle


« Le Erouv, appelé aussi Chitoufei Mevoot, peut, sous certaines conditions, embrasser toute une ville et lui conférer le caractère de Domaine Privé et permettre à un chacun de déplacer des objets d’un endroit à un autre, sans se mettre en contravention avec la Loi ». (Choul’Hane Aroukh)


Grand Rabbin Gilles Bernheim: "Le jour du Shabbat, il est licite de transporter un objet à l'intérieur du domaine privé, car ce dernier a pour fonction de rassembler et d'accueillir: c'est bien l'idée de générosité que nous pouvons entrevoir ici. Porter reste une activité licite dans la mesure où la finalité est le partage. (...)Le domaine public quant à lui, est celui où notre identité est en mouvement, remodelée en permanence, notamment dans le circuit des échanges. Dans cet espace-là, il n'est plus licite de porter quelque chose le Shabbat". (in. Le Souci des Autres, au fondement de la Loi juive. ed. Calmann-Lévy 2002).

*

Apres la célèbre rencontre avec son frère ennemi, Yaakov reprend son chemin vers son père, et nous lisons dans notre parasha (Bereshit, chapitre 33, verset 18) : « Yaakov arriva, entier, à la ville de She’hem en terre de Canaan, alors qu’il venait de Padan Aram, et il campa en face de la ville. »

Le Midrash Rabba commente ainsi ce verset : « il entra (dans la ville) le vendredi soir avec les rougeoiements du soleil, lorsqu’il faisait encore jour, et fixa les te’houmim (limites) lorsqu’il faisait encore jour. Ceci établit que Yaakov respectait le Shabbat avant qu’il n’ait été donné (au peuple juif). »

C’est un enseignement récurrent de nos Sages à propos des Patriarches : ils accomplissaient les commandements de la Torah avant même que Moshé ne les ait reçus au mont Sinaï.

Cela mérite certainement une très large étude, mais nous nous intéresserons plus particulièrement dans le cadre de cet article à l’idée exprimée ici par le respect de Yaakov de la halakha des te’houmim, des limites shabbatiques.

Il existe un débat concernant la valeur même de cette halakha. Est-ce une mitzva de la Torah, ou a-t-elle été instituée par nos Sages ? Cette dernière opinion est retenue par la plupart des décisionnaires. Quoi qu’il en soit, le principe est le suivant : quand arrive le Shabbat, le Juif est astreint à ne pas se déplacer hors des limites de l’endroit où il se trouve. Plus précisément, il aura droit à 2 000 coudées de rayon calculées à partir d’un point donné. Eventuellement, il lui sera possible de rallonger d’autant ses déplacements à l’aide d’un ‘erouv.

Nous n’entrerons pas davantage dans les détails de cette mitzva, qui sont exposés dans une bonne partie du traité ‘Erouvin. Citons néanmoins la Beraïta suivante (page 51a) à propos du verset (Shemot, chapitre 15) : « ‘que chacun s’installe à sa place’, voici les 4 coudées, ‘que personne ne sorte de son endroit’, voici les 2 000 coudées. »

Par ailleurs, nous trouvons dans le traité Shabbat 118a un enseignement apparemment contradictoire. « Rabbi Yo’hanan dit au nom de Rabbi Yossi : quiconque ’délecte’ le Shabbat, on lui donne un héritage sans limites, comme il est dit dans Isaïe, chapitre 58 : ‘alors tu te délecteras en Hashem et Je te ferai chevaucher sur les hauteurs de la terre et Je te ferai consommer l’héritage de Yaakov ton ancêtre...’ Non pas comme Avraham, à propos duquel il est dit (Bereshit, 13) : ‘lève-toi et déplace-toi dans le pays, dans sa longueur et dans sa largeur, car c’est à toi que Je vais le donner.’ Ni comme Yitz’hak, à propos duquel il est dit (Bereshit, 26) : ‘car c’est à toi et à ta descendance que Je donnerai ces terres-là.’ Mais comme Yaakov, à propos duquel est dit (Bereshit, 28) : ‘et tu te développeras à l’Ouest comme à l’Est, au Nord comme au Sud.’ [Le verset emploie le verbe oufaratzta, que nous avons traduit par « tu te développeras », dont l’étymologie est précisément la notion de brèche, et qui signifie donc hors limite, casser la limite.]

Voici donc une Guemara traitant du Shabbat où Yaakov est défini comme le Patriarche qui se développe au-delà des limites ! C’est l’inverse de notre Midrash, qui associe Yaakov à la notion de te’houm, de limite shabbatique. Peut-être pouvons-nous justement mieux appréhender la dimension de Yaakov à partir de ce texte, qui ne se contente pas de l’exposer, mais qui la confronte à celles d’Avraham et de Yitz’hak.

La démarche d’Avraham est de l’ordre de l’action, lève-toi et déplace-toi. C’est celle du ‘hessed, celle qui préside à la Création, celle qui détermine au niveau de l’homme le travail des commandements positifs, le zakhor du Shabbat.

La démarche de Yitz’hak est de l’ordre du travail sur soi qui va jusqu’à l’annulation de son ego, c’est la dimension propre aux commandements négatifs, le shamor du Shabbat. Ainsi, le verset dit « ces terres-là », langage qui paraît restrictif.

Yaakov, lui, se trouve être la synthèse de ces deux dimensions, qui permet une unification de ces deux pulsions. Ceci est de l’ordre de la perfection, qui s’apparente à la perfection de Shabbat. Cet état obtenu par le travail de toute une vie se doit d’être encadré par des limites. Celles-ci ne sont pas restrictives. Au contraire, elles signifient l’équilibre enfin trouvé. Le Juif peut enfin rester à sa place le Shabbat venu. Son travail est effectué, et il peut profiter des délices préparés durant la semaine.

Mais ce serait une erreur de croire que ce « repos » est stérile. Il est la source des bénédictions, comme le dit le Zohar sur parashat Yithro (88b) : « tous les six jours, de cette perfection reçoivent leur bénédiction. »

Ainsi notre texte parle-t-il de celui qui « délecte » le Shabbat, qui dépasse le zakhor et le shamor, qui parvient à goûter le délice de cette harmonie, celui-là est parvenu à l’équilibre de Yaakov, il est enfin à sa place et ainsi on lui promet un héritage sans limites.

Raphaël Bloch

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